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Angelo Bison - De la scène à l’écran. Passion et partage.

Focus

Angelo Bison, c’est « l’ennemi public » de la série éponyme. Vous l’avez d’ailleurs peut-être découvert à cette occasion . Mais saviez-vous qu’il est avant tout un homme de théâtre ? On pourrait presque préciser « de seuls-en-scène » tant il est habitué d’occuper le plateau par cet exercice difficile. Da solo en fait partie. Et ça se passe du 21 au 24 septembre 2021 à la Maison du Peuple. Rencontre à bâton rompu.





Saint-Gilles, c’est une commune que vous connaissez bien ? que vous évoque-t-elle ?


J’ai habité à St-Gilles plusieurs années. J’ai fréquenté assidument ses cafés et restaurants et de temps en temps le stade de foot pour voir l’Union ST Gilloise. C’est une commune avec une population très diversifiée, venant de pays différents, de cultures très diverses et qui vivent en harmonie. C’est une grande richesse se vivre ensemble dans le respect de l’autre. St-Gilles est une commune où on aime faire la fête il suffit pour cela de voir le nombre de bars et de restaurants ; il y en a pour tous les goûts.



Da Solo est avant tout un roman de l’autrice belge Nicole Malinconi. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’adapter celui-ci ?


C’est Nicole Malinconi qui me l’a demandé après avoir vu Fabbrica de Ascanio Célestini il y a vingt ans. A l’époque, j’étais trop jeune pour aborder ce texte. Maintenant, après plus de quarante années de carrière, j’avais la maturité pour incarner ce rôle. Ce qui me plait, c’est le regard que ce personnage porte sur sa vie, sur ses racines Italiennes, son humour, sa philosophie simple d’un homme comme tout le monde avec ses erreurs, ses regrets, ses joies…La prise de conscience que chaque acte que tu poses, implique un chemin et par conséquent en oublie d’autres.



Dans un contexte de migration italienne, le thème central du récit est le bilan qu’un homme porte sur sa vie à la lumière de la fidélité qu’il a eue pour ses rêves d’enfants. Jouer était-il l’un des vôtres ? Et quel regard portez-vous sur votre parcours ?


Non, je n’avais pas vraiment de rêves, juste de l’ennui à l’école et plus tard à l’usine ; je ne savais pas pourquoi j’étais venu sur cette terre. Mon parcours est celui d’un homme qui a trouvé sa voie dans le théâtre. Il m’a sauvé de l’ennui. iI m’a permis de me réaliser pleinement dans ce monde. Il a façonné l’homme que je suis. A chaque représentation, j’ai donné au public le meilleur de moi-même car l’honnêteté est la qualité essentielle pour un comédien.



Après Lehman triologie vous retrouvez Lorent Wanson à la mise en scène. C’était une évidence de recollaborer avec lui sur ce projet ?


Bien sûr. Lorent est un grand créateur et un grand être humain, il est le metteur en scène idéal pour me guider dans les pas de mon personnage. Il aime profondément les gens. C’est un Artiste avec un regard bienveillant sur les femmes et les hommes qui peuplent ce monde.



On peut dire que vous êtes un habitué des seuls-en-scène. Quel rapport entretient-on avec le texte et le public quand on est « seul » à habiter l’espace ?


J’apprécie le seul-en-scène car il permet un rapport direct avec le spectateur ; vous êtes celui qui met en chair le verbe de l’auteur. Vous incarnez les émotions du personnage dans un face à face avec le public, vous jouez avec lui, vous le manipulez et - si vous faites bien votre travail - vous le transportez dans un ailleurs, vous lui faites croire que ce qu’il voit est la réalité alors que c’est du théâtre.



Vous tenez le rôle phare de la série Enneni public dans laquelle on retrouve également d’autres acteur.rice.s belges de théâtre tel que Stéphanie Blanchoud, Philippe Jeusette, Laura Sépul ou Daniel Hanssens. Pensez –vous que le lien entre le monde du théâtre et celui du cinéma se fait plus facilement aujourd’hui ?


Les séries ont donné l’occasion de montrer la qualité de nos comédiennes et comédiens mais aussi des réalisateurs, des scénaristes, des techniciens…Elles ont permis au grand public qui ne va pas forcément au théâtre de découvrir les artistes belges de les apprécier ; en un mot, de les faire connaître pas seulement chez nous mais aussi à l’étranger. J’ai d’ailleurs reçu à Paris le prix du meilleur acteur au festival « Série mania ». Maintenant, il faut plus de moyen surtout pour les longs-métrage afin de permettre aux réalisateurs.rices et aux actrices et acteurs d’aller plus loin…Et qui sait, de remplir un jour les cinémas !



Que ce soit dans Ennemi public ou dans le solo Un homme si simple, vous incarnez des personnages tourmentés. Comment se prépare-t-on à donner corps aux parties les plus sombres de l’âme humaine ?


Grande question ! Et dans L’avenir dure longtemps, je joue le rôle du philosophe Louis Althusser qui étrangla sa femme dans les années quatre-vingt. Alors, comment se préparer sinon en acceptant ce voyage en enfer, ne pas chercher à comprendre et laisser la violence de la pulsion prendre possession de vous ; de vous laisser envahir par elle le temps de la représentation ou du tournage. Et puis, en sortir, prendre du recul et revenir à votre vie avec la distance nécessaire d’un acteur avec son rôle. Car pour jouer la folie (pour employer un terme simple et générique), il faut pouvoir la regarder en face les yeux dans les yeux et lui dire je n’ai pas peur de toi.




Enfin, v ous évoquiez pour Cinevox il y a un an, une certaine fatigue après 40 ans d’aventures théâtrales et votre souhait de faire une pause … vous n’avez pas arrêté depuis. La pause est postposée ?


J’avais surtout envie de faire du cinéma qui était nouveau pour moi. Avant la série, je n’avais quasiment jamais tourné car le théâtre remplissait ma vie et ne me laissait pas le temps de faire autre chose. Quand j’ai découvert le théâtre, cela a été une révélation pour moi ; il m’a donné de très grandes joies. Je suis infiniment reconnaissant à mon métier mais après plus de quarante ans de vie commune, je voulais vivre autre chose grâce au cinéma, vivre de nouvelles expériences… J’ai fait de la place dans ma vie pour cet autre chose. L’année passée, je n’ai donné qu’une vingtaine de représentations et cette année une dizaine. Mais à part les deux saisons d’Ennemi public , je n’ai tourné que quelques jours en presque 5 ans. Alors une saison 3 avec Béranger qui sera la dernière et puis…



Propos recueillis en 2020