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Valérie Provost — Tisseuse de lien

Interview

Valérie Provost est une artiste « pluri plasticienne » initiatrice, notamment, du projet Quartiers brodés. Elle est aussi docteure en psychologie et art-thérapeute. Animée par toutes ses facettes et son envie de créer du lien, elle décide il y a un an d’ouvrir l’espace Pierre Papier Ciseaux. Un lieu volontairement ancré et ouvert sur son quartier... On peut, chacun à son rythme (elle y tient) : suivre à un atelier créatif collectif pour adultes ou enfants, découvrir une oeuvre, assister à une conférence ou une projection, participer à un projet collectif (Quartiers brodés, Culottes Parlottes1), prendre part à une séance individuelle d’artthérapie et même s’initier à la pleine conscience, suivre un « connective workshop2 » ou bénéficier d’une médiation (accompagnement vers une résolution de conflit). Un patchwork de propositions tournées vers une même intention : s’autoriser une parenthèse et aller à la rencontre. Un lieu qui vit actuellement sans subvention grâce aux engagements de chacun.

Pouvez-vous brièvement nous parler de votre parcours ?

J’ai fait des études de psycho, une thèse. Par la suite, j’ai travaillé dans le secteur des droits humains et des droits de l’enfant. En parallèle, j’ai toujours eu un travail artistique. Parfois, ça a pris plus de place, parfois moins selon ma vie, mes besoins, ma disponibilité. Et puis un moment donné, j’ai entamé une formation en art-thérapie. Je me suis rendue compte – un peu par le hasard de la vie – que l’art thérapie pouvait se faire rejoindre toutes mes préoccupations personnelles mais aussi mon élan vers les autres. C’était le début d’une autre vie qui me mène aujourd’hui à cet espace et notamment à Quartiers brodés.

Quartiers brodés se déploie sur Saint-Gilles depuis un an et demi. Comment ce projet s’est-il créé ?

Au départ, il y a eu un appel à projet éco-citoyen de la Maison Eco en 2018. Ma proposition était une œuvre collective qui allait m’amener dans les quartiers de Saint-Gilles et un peu plus loin. Soit une grande toile (3 m sur 2m80) sur laquelle a été dessiné le plan réel de Saint-Gilles et sur laquelle les participants ont été invités à broder des ilôts.

Quelle était son intention principale ?

Tisser des liens. Que chacun se sente bien dans le moment présent et sente que tout est possible. J’ai voulu que ce projet soit gratuit et itinérant. J’ai été accueillie en de nombreux endroits (CPAS, écoles de devoirs, associations, prison, chez des particuliers, les parcs) … Mon désir était de toucher un maximum de personnes, de dépasser tout « entre soi » …

Comment se passe un atelier ?

Les ateliers sont continus, les personnes peuvent venir de3 min à 3 heures. Sur la toile, tout peut être brodé, avec du fil, des perles, du tissu. Si on est attentif, on remarque que les gens mettent souvent quelque chose de très intime. Il n’y a néanmoins pas de partage obligé sur ce qui est réalisé ni de tour de table des participants. Dans ce cadre-là, chacun peut venir chercher ce dont il a besoin, sans justification, et sans même y penser.

Quel regard portez-vous aujourd’hui sur ce projet ?

C’était fabuleux et porteur. C’était une entreprise conséquente : 60 ateliers ont été menés. Il a nourri d’autres projets : Quartier Brodés - Parc de Bruxelles et Quartiers brodés -Traces d’histoires3 sur

lequel est dessiné le planisphère de la terre, et qui est animé à l’attention de mineurs étrangers non accompagnés. Il sera exposé chez Pierre Papier Ciseaux pendant le Parcours d’Artistes. J’ai volontairement voulu que ce soit celui-là pour accentuer la dimension inclusive du projet.